L’image du rocher émergeant au milieu de la baie avec sa tour qui domine sera celle qui vous convaincra de visiter le Mont Saint-Michel. Mais cette découverte serait vide si vous ne veniez pas visiter l’abbaye du Mont Saint-Michel et en connaître les entrailles. Il est possible que votre idée ait été d’y aller, de marcher un peu dans la ville et de repartir… Grosse erreur ! L’abbaye est une merveille, au-delà du fait qu’un de ses bâtiments (un ensemble gothique) s’appelle comme ça : La Merveille !
Imaginez-vous visiter un bâtiment qui n’a cessé d’évoluer depuis 1 300 ans ? Il y avait même des parties en chantier quand nous y sommes allés… les travaux n’en finissent pas ici. Lorsque vous réaliserez sa taille, que vous n’imaginez jamais de l’extérieur, cela ne vous surprendra pas. Découvrez l’une des icônes de France les plus reconnues au monde, l’endroit le plus célèbre de Normandie.
Informations pratiques pour la visite
L’abbaye est ouverte tous les jours de l’année sauf les 1er janvier, 1er mai et 25 décembre. Ses horaires sont de 9h à 19h de mai à août et de 9h30 à 18h de septembre à avril. Gardez à l’esprit que la billetterie ferme une heure avant… et qu’avec une heure vous n’aurez pas le temps de tout voir. Attention, en période de marée exceptionnellement haute, l’accès au mont et à l’abbaye est fermé.
Le prix d’un billet en visite libre est de 11 €, il y a un billet à tarif réduit et l’accès est gratuit pour les citoyens de l’Union européenne de moins de 26 ans. Si vous venez en été, vous pouvez acheter un billet coupe-file à l’avance et éviter la file d’attente. La visite conférence, une visite guidée avec laquelle vous pouvez accéder à des lieux fermés au public, coûte 18 €.
Des visites privées en groupe peuvent également être faites avec accès à la tour abbatiale et à la zone des contreforts ou même de nuit. Pour connaître les différentes visites, les prix et la disponibilité, je vous conseille de consulter ce site. La location d’un audioguide est également possible si vous voulez en savoir plus sans réserver de visite conférence. En été, vous pouvez également participer aux Nocturnes de l’abbaye avec des installations lumineuses.
Origine de l’abbaye du Mont Saint-Michel
Au 8ème siècle, l’archange Saint Michel lui-même serait apparu à l’évêque d’Avranches lui demandant de construire un sanctuaire sur l’îlot rocheux appelé Mont-Tombe en son honneur. Jusque là, il n’y a pas beaucoup de différence avec les origines des autres constructions religieuses. La chose « curieuse » est que l’archange dut se présenter pas moins de trois fois à l’évêque (qui deviendra plus tard Saint Aubert) avant de réussir à se faire écouter.
Chanceux à la troisième fois ? Eh bien, plus que l’insistance, qui n’était pas peu, le futur saint Aubert fut convaincu lorsque saint Michel toucha sa tête avec son doigt et fit un trou dans son crâne… C’est qu’il ne faut pas ignorer le chef de la milice céleste !
Au-delà de la peur que devait ressentir saint Aubert, l’archange saint Michel était considéré comme le guide des morts et celui qui examinera les âmes au jour du jugement dernier : il est représenté avec une balance, ainsi qu’avec une épée. Alors, si votre futur « examinateur » vous demande un sanctuaire, vous le construisez sans poser de questions, et puis c’est tout !
Histoire de l’abbaye du Mont Saint-Michel
Depuis ce lointain 709 (date de la consécration de la première église) jusqu’à aujourd’hui, l’abbaye du Mont Saint-Michel n’a fait que croître physiquement et en importance.
Au 10ème siècle une communauté bénédictine s’installe sur le rocher et construit trois chapelles. Au 12ème, une église romane est construite sur l’une des chapelles. La communauté ne cesse de s’agrandir, atteignant une soixantaine de moines, et les premières maisons sont construites au pied du rocher : ainsi est né le village. Bastion imprenable pendant la guerre de Cent Ans, ses murailles et fortifications, ajoutées aux édifices religieux, en ont fait un exemple d’architecture militaire.
Aux 17ème et 18ème siècles fut édifiée l’abbaye gothique à arcs-boutants que l’on voit aujourd’hui. Au 20ème siècle, l’effondrement d’un édifice obligea à la construction de contreforts qui « complètent » la roche pour créer l’image que nous avons aujourd’hui.
Après la Révolution française, lorsque les bénédictins eurent abandonné l’abbaye, celle-ci fut transformée en prison (qui a existé jusqu’au milieu du 19ème siècle). Moment où les premiers « touristes » ont commencé à arriver : écrivains et peintres romantiques attirés, comme nous le sommes aujourd’hui, par la silhouette de l’île, ses marées et son architecture impossible.
Curiosité : le Mont Saint-Michel, symbole normand par excellence, a été breton pendant un peu moins de 60 ans. Le roi Salomon de Bretagne aida Charles le Chauve à se défendre contre les Vikings au 9ème siècle et, en retour, garda cette partie de la Normandie entre 867 et 933. De nos jours, malgré le fait que l’histoire bretonne du Mont Saint-Michel ait été très brève, beaucoup de bretons la ressentent comme la leur et sur les cartes de Bretagne vous verrez parfois l’île incluse.
Une immense abbaye : 3 étages et 20 salles
Si, comme nous avant de venir faire une exploration de l’abbaye du Mont Saint Michel, vous pensez que l’intérieur de l’abbaye n’est que l’édifice au sommet de l’île, avec l’église et sa tour sur laquelle se trouve la statue de l’archange, vous vous trompez lourdement !
Dès que l’on franchit le mur et que l’on pénètre dans la ville, les panneaux donnent un indice : trois étages et vingt pièces, c’est énorme. Et lorsque vous arrivez à l’entrée de l’abbaye, elle se situe juste au-dessus des toits des premiers bâtiments. Si bas ? Oui, cela veut dire que de là jusqu’à la pointe de l’épée de la statue, c’est toute l’abbaye du Mont Saint-Michel.
Terrasse ouest, église abbatiale et archange
L’abbaye avait sa propre fortification au-delà de celle de la ville, donc la première chose que vous découvrirez lors de votre visite de l’abbaye sera la salle des gardes. Aujourd’hui il y a également des gardiens, mais ils ne font que veiller à ce que vous payiez votre entrée !
Une fois la salle franchie, vous montez l’escalier du Grand Degré jusqu’à la terrasse ouest. Vous êtes en face de l’église abbatial, au-dessus de l’espace qu’occupait l’église primitive du Mont Saint-Michel jusqu’à ce que cette partie disparaisse dans un incendie au 18ème. Il a été décidé de ne pas reconstruire l’atrium et les trois premiers pans de la nef, laissant un espace libre.
On prend son temps pour admirer sereinement le paysage qui entoure l’abbaye : la baie, la rivière Couesnon, les îlots rocheux qui entourent le Mont Saint-Michel… Il est possible, par temps clair, de voir les îles Chausey d’où fut extrait le granit pour la construction de l’abbaye.
Maintenant, tournez-vous et saluez l’archange. Il vous répondra par ses de 4,5 mètres de haut et ses 410 kilos de cuivre doré. Devant l’abbaye, la statue est pratiquement une jeunette. La tour a été construite en 1897 et c’est alors que l’archange a été placée.
L’église, restaurée après l’incendie et avec des parties du 11ème au 19ème siècles, serait déjà une raison suffisante pour venir faire une visite de l’abbaye du Mont Saint Michel, mais gardez tout de même votre émerveillement pour la suite car ce n’est pas fini…
Le cloitre de l’abbaye
Le cloître de l’abbaye du Mont-Saint-Michel, commencé par Thomas des Chambres et terminé en 1228, par Raoul de Villedieu, est un chef-d’œuvre de l’architecture gothique flamboyante. Il a été construit à partir de 1210 et est un magnifique exemple de ce style.
C’est un cloître carré de 35 mètres de côté, entouré de quatre galeries. Chacune des galeries est soutenue par des colonnes en pierre, qui sont ornées d’arcades sculptées et décorées de consoles, de chapiteaux et de fleurons. Les chapiteaux représentent des scènes bibliques et des motifs végétaux. Le cloître renferme un jardin, qui est le lieu de dévotion des moines.
Il est entouré de plusieurs bâtiments religieux, dont l’église abbatiale et la salle capitulaire. C’est un lieu de méditation et de contemplation pour les pèlerins et les visiteurs de l’abbaye.
La Merveille du Mont Saint Michel
Que l’un des bâtiments de l’abbaye du Mont Saint-Michel soit connu sous le nom de « La Merveille » en dit long. Avec ses trois étages, c’est un véritable gratte-ciel gothique. A l’intérieur se trouvent trois réfectoires, un cloître à ciel ouvert au dernier étage, une salle d’étude avec un scriptorium, le garde-manger, des chambres pour les hôtes nobles et les pèlerins…
Une ville dans l’abbaye, qui servait aussi de voie de communication entre ses différents étages et salles. L’organisation des espaces était très claire : le dernier étage était réservé aux moines, le second aux hôtes de haut rang (même des rois sont venus ici) et le plus bas aux pèlerins sans ressources et ouvriers. Sommes-nous égaux aux yeux du Seigneur ?
Observez les cheminées du réfectoire des invités de marque : elles ne mesurent pas moins de 2,5 mètres ! Imaginez quels barbecues ils ont dû y faire ! Et oui, ils l’ont fait.
Les cryptes et chapelles de l’abbaye
Les cryptes sont les parties les plus anciennes de la construction, à l’origine de tout. La crypte de Saint Martin, par exemple, a été construite en l’an 1000 avec des murs de 3 mètres d’épaisseur. C’est comme ça pour tout ici : des superlatifs. Des murs de 3 mètres d’épaisseur de la crypte de Saint Martin aux 5,2 mètres des piliers de crypte des Gros Piliers.
La chapelle de Saint-Étienne servait de chapelle aux morts et d’ossuaire des moines. Un autre ossuaire se trouvait dans la salle précédente qui, lors de son passé de prison du Mont Saint-Michel, était occupée par une grande roue. La roue faisait office de « moteur » d’ascenseur : les prisonniers pénétraient à l’intérieur pour la faire tourner et la corde soulevait la nourriture et autres objets nécessaires au fonctionnement de la prison.
Oui, vous n’allez pas cesser de monter et descendre des escaliers, d’aller du nord au sud et d’est en ouest, de passer d’un siècle à l’autre… la visite de l’abbaye du Mont Saint Michel est un véritable labyrinthe dans lequel les moines devaient se perdre de temps en temps. Même les guides, comme nous l’a dit la nôtre, ont besoin de quelques semaines pour se repérer.
La salle dite des Chevaliers
Vous terminerez votre visite de l’abbaye du Mont Saint Michel par la salle des Chevaliers qui se trouve sous le cloitre. La salle est construite en style gothique, avec des murs en pierre et des colonnes magnifiques qui supportent tout le poids du cloitre et de son jardin.
Dans un coin, se trouve une grande cheminée en pierre, cette pièce ressemble à la salle des hôtes, bien que les piliers soient différents : ils sont construits en un seul bloc dans la salle des hôtes alors qu’ici ce sont des tambours de granit superposés (on peut voir les joints).
L’architecture « impossible » de l’abbaye
Comment a-t-il été possible de construire une église de la taille de celle qui existait (aujourd’hui plus petite après l’incendie) au sommet d’une petite montagne ? Avec de l’imagination et avec quelques solutions architecturales avancées pour l’époque.
La première chose était de créer l’espace au sommet du mont. Aplatir le rocher en coupant le haut n’était pas envisageable, qu’aurait pensé le chef des milices célestes s’ils avaient abaissé la hauteur de l’endroit qu’il désignait ? La solution était de construire les cryptes. Et ensuite les chapelles. Ces chapelles, construites autour du sommet, ont créé la surface plane pour construire l’église.
Le deuxième problème était l’espace lui-même. Au fur et à mesure que la communauté grandissait et avait besoin de plus de pièces, il n’y avait plus de paroi rocheuse sur laquelle construire. La solution : construire en hauteur. Mais, pour qu’il ne s’enfonce pas, il fallait que les sols soient de plus en plus légers : lors de votre visite de l’abbaye du mont Saint Michel, faites attention aux colonnes croisées, uniques en France, rappelant le jardin d’Eden du cloître de La Merveille.
Le manque d’espace sur le mont a inspiré l’un des bâtiments les plus uniques et les plus beaux que vous puissiez visiter en France.
Visites guidées de l’abbaye
Au cas où vous ne seriez pas encore convaincu : le mieux que vous puissiez faire est de visiter l’abbaye du Mont Saint-Michel avec un guide afin qu’en plus d’en apprendre plus sur son histoire et son architecture, vous découvriez des faits insolites. Des curiosités telles que la façon dont les moines ont communiqué, qui ont fait vœu de silence; localiser les latrines ; ou découvrir les fleurs de lys et les châteaux au sol de terre cuite d’origine en l’honneur de la reine de Castille et accéder à des salles qui ne sont pas comprises dans la visite standard.
En fait, il est pratiquement impossible de se perdre car l’itinéraire à l’intérieur de l’abbaye est très bien indiqué, mais croyez-moi quand je vous dis qu’il y a eu des moments où nous ne savions pas où nous étions. Et ça doit être quelque chose de normal, d’ailleurs Claire, notre guide, nous demandait de temps en temps si on savait où nous étions… Et on n’avait pas toujours raison !