Perché sur un éperon rocheux à 450 mètres au-dessus de la vallée de l’Ostriconi, Lama est considéré comme l’un des plus beaux villages du nord de la Corse. Et c’est mérité, c’est un joyau médiéval d’architecture rurale qui conserve de belles demeures bourgeoises des 18ème et 19ème siècles, jadis celles des riches producteurs. Lama est une pépite architecturale de Balagne agréable à visiter.
Lama est un petit village avec des rues pavées, de petites ruelles, des arches, quelques restaurants et des paysages époustouflants. Il attire de nombreux visiteurs qui souhaitent avoir un aperçu de la personnalité de l’île, ainsi que des randonneurs qui veulent monter jusqu’au Monto Astu pour admirer la vue extraordinaire sur le magnifique littoral et les hauts sommets du nord de la Corse !
Histoire de Lama en Corse
Les premières maisons de Lama ont été construites sur une sorte de « nid d’aigle » au pied d’une tour défensive, appelée en langue corse « A Torra ». Elle s’est effondrée vers 1950 et il ne reste plus grand chose aujourd’hui de cette tour de guet, juste la base. La particularité architecturale de Lama est de voir le mariage harmonieux de deux styles différents : au cœur du village, les vieux quartiers où la plupart des soubassements et des premiers niveaux datent du Moyen Âge. Ce sont des maisons collées les unes aux autres, dans un dédale de ruelles pavées, de passages couverts et voûtés !
Autour de ces vieux quartiers, de grandes maisons bourgeoises du 18ème siècle ou du début du 19ème (i palazzi), par les grands propriétaires d’exploitation d’oliviers. La richesse matérielle a favorisé la création d’un milieu intellectuel villageois, féru de culture italienne. Les familles aisées envoyaient leurs enfants faire leurs études à Rome, Pise, Lucques, Florence ou Venise : beaucoup y faisaient carrière et, de retour, imitaient ce qu’ils y avaient vu et apprécié., comme les maisons d’inspiration toscane.
C’est ainsi que la maison Bertola a été surmontée d’un belvédère d’inspiration toscane. Selon la tradition familiale, l’histoire de ce belvédère remonte au « vœu d’Eléonore ». Cette demoiselle, fille de Fabien Bertola, était en mauvaise santé et fut conduite à Pise pour consulter un médecin réputé. C’est lors de ce séjour en Toscane qu’elle découvrit l’architecture des belvédères. À son retour, elle demanda à son père d’en construire un, mais il refusa. La maladie finit par l’emporter, mais avant de mourir, dans son délire, elle évoqua encore et encore le belvédère. Le père, en mémoire pour sa fille, se décida finalement à en construite un et fit appel à des maestri italiens pour son édification.
Explorer ce village médiéval
Explorer Lama est un pur plaisir pour les yeux si vous aimez l’architecture ancienne. Pour bien profiter de votre promenade dans cet ancien village médiéval, je vous conseille de suivre l’itinéraire fléché qui part de la casa cumuna (mairie). Mais prenez d’abord un peu de temps pour apprécier l’extérieur et l’intérieur de San Lurenzu, l’église paroissiale de Lama construite au milieu du 16ème siècle sous le nom de Notre-Dame des Grâces. Elle a été restaurée et agrandie au milieu du 17ème siècle et a alors pris le nom de Notre-Dame de la Visitation.
On ajoutera ensuite le titre de San Lurenzu qui était attaché à l’ancienne église, située dans la vallée en contrebas du village, abandonnée à la fin du 18ème siècle.
Montez ensuite la route pour passer à droite de la casa cumuna pour commencer votre exploration de Lama : il y a un circuit fléché facile à suivre (petites flèches en fer). La première maison de notable que vous découvrirez sera la casa Ceccaldi, une maison construite entre les 17ème et 18ème siècles, augmentée d’un étage, ornée d’arcades et de peintures plafonnantes en 1858. Ces ornements, comme la cour fermée, sont caractéristiques de certaines maisons de notables ruraux au 19ème.
Vous allez ensuite entrer dans la ruelle sur votre droite pour découvrir les anciennes petites maisons médiévales, telles que la casa Monti, un bel exemple d’architecture villageoise conservée dans son ancien état, peu modifiée au 19ème siècle.
La suite est un dédale de ruelles, d’arches, de voûtes et de petites maisons en pierre collées les unes aux autres. C’est un village réellement plein de charme dans lequel vous découvrirez aussi les caves d’affinage (e casgiaghje). En effet, le village comptait aussi quelques grandes familles de bergers, utilisateurs exclusifs de cet ensemble de caves voûtées, consacrées autrefois à l’affinage du fromage de brebis ou de chèvre.
Votre trajet passera également par le u mercatu : nom traditionnel du cœur de l’ancien village, u mercatu évoque le lieu où devait se tenir le marché de Lama en Corse.
Une fois en haut du village, vous aurez une belle vue sur le belvédère de la maison Bertola. C’est également à cet endroit que vous découvrirez les reste de l’ancienne tour de guet.
Un peu plus haut, c’est le départ de la randonnée du Monte Astu, ou la suite du sentier du patrimoine que vous venez de faire en partie. Je vous en reparle plus loin.
Si vous ne souhaitez pas poursuivre sur le sentier du patrimoine, vous pouvez tranquillement redescendre le village pour rejoindre votre voiture ou aller boire un verre.
Les randonnées autour du village de Lama
- Ascension du Monte Astu : plus de 6H00 de marche aller-retour et de 1000 mètres de dénivelé pour cette randonnée menant vers l’un des plus beaux panoramas de la Corse.
- Sentier du patrimoine : boucle dominant le village, 2 heures de marche et moins de 200 mètres de dénivelé. Architecture, histoire, ethnographie et paysages sont au programme.
- Liaison Lama – Urtaca : 1H45 aller-retour pour une centaine de mètres de dénivelé pour ce beau chemin en balcon au dessus de la vallée de l’Ostriconi.
- Bocca di San Pancraziu : sentier remontant un vallon sauvage vers la crête dominant les Agriates, le Nebbio et la Balagne, 4H aller-retour au départ d’Urtaca et 650 m de dénivelé.
- Chemin de Bocca di Tenda : 4H30 aller-retour avec 750 mètres de dénivelé positif au départ de Pietralba pour ce chemin menant sur la crête du massif de Tenda.
- Boucle de Casenove : cet itinéraire boisé permet de rejoindre le village en ruine de Casenove. 1H30 de marche pour 250 mètres de dénivelé positif à partir de Pietralba.
- Chemin Pietralba – Novella : 6H30 de marche aller-retour et 600 m de dénivelé sur cet itinéraire de crête surplombant la vallée de l’Osrtriconi face au massif de Tenda.
Le sentier du patrimoine
J’ai parcouru ce sentier en famille et nous l’avons beaucoup apprécié. Vous avez déjà découvert le début de cette randonnée à travers le village qui démarre près de la casa cumuna et qui suit un fléchage. Une fois en haut du village il faut prendre le sentier qui mène vers le Monte Astu. C’est facile à suivre, il y a un fléchage jaune avec des traits de peinture un peu partout sur les rochers, vous ne pouvez pas vous tromper.
Après le village, le chemin grimpe en lacets (comptez entre 30 et 45 minutes de grimpe modérée) jusqu’au petit plateau d’i Luzarelli, couvert de genévriers. Ce plateau offre un large panorama sur les sommets granitiques du massif du Cintu jusqu’à la mer.
Au bout du plateau, un sentier part tout droit, c’est le chemin vers le sommet du Monte Astu (grosse marche en perspective par là). Vous devez plutôt prendre l’autre chemin qui part vers la gauche et indiqué « sentier de la mémoire » par un panneau. Il vous mène au point culminant de votre randonnée, le Monte Grossu à 691 mètres d’altitude.
Vous allez ensuite entamer la descente sur un chemin parfois un peu escarpé et en sous-bois où vous allez voir de nombreux ancien mur en pierre sèche. La pierre sèche, matériau disponible abondamment sur place, a été couramment utilisé pour l’aménagement de ces chemins. Ces murs sont des témoignages remarquables d’un savoir-faire traditionnel.
La descente sur ce sentier va vous mener jusqu’à Funtana Bona (tournez sur la droite une fois en bas du sentier), autrefois lieu d’approvisionnement pour les porteuses d’eau et lavoir du village. Ce lieu, aujourd’hui paisible, occupait jadis une place très importante dans la vie du village. C’était principalement le lieu de convivialité des femmes, leur domaine réservé. Elles s’y rendaient deux fois par jour afin de remplir les seilles (e sechje), nécessaires à l’approvisionnement de la famille en eau, mais elles faisaient également la corvée de lessive au lavoir communal qui existait alors sous la voûte de cette même fontaine, dans sa partie gauche. Le linge mouillé n’était pas ramené à la maison, il était étendu sur les buissons, aux clôtures, de tous côtés le long du chemin de la fontaine.
Après cette halte rafraichissante à la fontaine, le chemin conduit à la découverte des terrasses de culture et de leurs vieux murs en pierre sèche. Il s’agissait d’anciens jardins, reproduisant par leur configuration et leur superficie la hiérarchie villageoise. Ces terrasses apportaient une réponse efficace au ravinement des sols, emportés par les pluies parfois violentes. Elles présentaient également des avantages essentiels pour toutes les cultures. En accumulant de grandes quantités de terre, les racines pouvaient ainsi pénétrer dans le sol, aller chercher l’humidité conservée en profondeur et lutter contre la sécheresse. Enfin, en emmagasinant la chaleur du soleil, les murs de pierre sèche pouvaient la restituer, la nuit venue, favorisant ainsi le développement des cultures.
Le parcours regagne ensuite le village pour découvrir les anciennes et pittoresques caves d’affinage de la maison Corallini dont je vous ai parlé au début de cet article !
Festival du film de Lama en Corse
Le festival du film de Lama propose des projections en plein air au cœur des montagnes corses. Longs métrages et courts métrages, conférences, expositions de photos, projections de films d’animation viennent à la rencontre du monde rural. Une semaine de cinéma sous le regard des étoiles… à ne pas manquer ! Ce festival a lieu la semaine à cheval sur fin juillet et début août.
Si vous aimez l’ancienne architecture, ne manquez pas une visite de Lama en Corse lors de votre séjour sur l’île de Beauté !