Partons à la découverte de Fiuminale, un village de Haute-Corse abandonné depuis les années 80. Fiuminale est un village (deux hameaux en fait) déserté de la Costa Verde, principalement du fait qu’il n’y a pas de route qui y monte. Un âne était utilisé autrefois pour se déplacer. Le déclin a commencé dans les années 50/60. Savez-vous combien de villages abandonnés il y a en Corse? – apparemment, il y en aurait quasiment 80. Aujourd’hui, je vous propose de découvrir Fiuminale.
Comment venir au village de Fiuminale ?
Fiuminale, hameau de la commune de Velone-Orneto, se trouve en limite de la Castagniccia et de la Costa Verde et se situe à 550 mètres d’altitude. Il est uniquement accessible à pied ou à dos de cheval en empruntant deux sentiers : l’un au départ de Velone, l’autre au départ du Pont de l’Enfer.
Départ au hameau de Velone
Au bout de la route en impasse conduisant à Velone et à l’entrée de ce village (il y a quelques places pour se garer) un panneau attenant à l’aire de stationnement indique la direction. Ce sentier est un peu plus rapide que l’autre (1h). Si vous venez faire cette marche, profitez-en pour visiter le petit hameau de Velone, il fait partie des plus beaux villages perchés de la Costa Verde selon moi.
Au bout de la route en impasse conduisant à Velone Orneto et à l’entrée de ce village un panneau attenant au parking indique la direction. Une barrière se présente aussitôt ; il faut prendre le sentier à droite, qui, après la montée du départ, file à flanc de montagne entre châtaigniers et arbousiers.
En vue de Fiuminale Sottano (le hameau inférieur), il faut être attentif : on doit trouver peu après une bifurcation sur la gauche le sentier d’accès (panneau discret). Ne prenez pas cette direction, car le sentier est complètement recouvert par la végétation, continuez tout droit et suivez le balisage orange pour arriver au village ruiné. On rejoint Fiuminale Soprano où l’on retrouve le sentier principal, en provenance directe de Velone Orneto. Après cette belle balade dans ce poignant lieu de mémoire, revenez à Velone Orneto et visitez ce charmant petit village, si ce n’est pas déjà fait.
Départ au pont de l’Enfer
Le Pont de l’Enfer (U ponte di l’infernu) est un lieu de légendes où il se dit que le diable a œuvré sur ces terres et que ceux qui y pénètrent doivent se tenir sur leurs gardes. C’est un endroit magnifique pour démarrer la randonnée vers le village de Fiuminale. Le temps annoncé est un peu plus long (1H15) mais la moitié du trajet qui longe la rivière Petrignani est vraiment exceptionnel ! Le pont se trouve sur la D330 et est très facile à trouver, il y a des places pour se garer en bord de route. Le départ de la randonnée se fait en suivant le chemin du restaurant « Le Pont de l’Enfer ».
Suivez le sentier jusqu’au restaurant puis restez sur ce chemin qui passe derrière et continuez en suivant le balisage orange. Le balisage est bien fait et va vous faire traverser plusieurs fois la rivière (elle est très peu profonde et il y a de nombreux gros cailloux qui permettent de ne pas se mouiller).
Si vous ne voulez pas risquer de vous mouiller les pieds, restez toujours à droite de la rivière sans suivre le balisage (les sentiers se croisent plusieurs fois en fait). Par contre si cela ne vous dérange pas de traverser la rivière, je vous conseille de suivre l’itinéraire balisé et de garder l’autre chemin pour le retour. En effet pour le retour vous pourrez suivre le chemin en restant cette fois à gauche de la rivière. Cette alternative de retour est sympa (et ça change de l’aller) avec des passages sur des petits ponts et cela permet d’avoir d’autres belles vues sur cette magnifique rivière aux gros rochers !
La première partie qui longe la rivière est facile avec très peu de dénivelé, par contre, une fois que vous vous éloignez de la rivière pour commencer à monter ça devient un peu plus pentu. Nous avons mis quasiment 2h00 à arriver en haut et pas 1H15 comme mentionné. Mais nous avons fait de nombreux arrêts pour profiter des paysages et faire des photos. Et la deuxième partie, bien en pente, nous a demandé des petites pauses car nous ne sommes pas des grands randonneurs !
Sur tout le chemin de randonnée qui se fait en forêt (la majorité de la randonnée est donc ombragée), vous verrez de nombreux arbres et souches étranges et étonnants !
Le hameau de Suttanu
Une fois en haut, le village apparait derrière les arbres et c’est une très belle récompense. Prenez le temps d’explorer ce premier hameau de Suttanu et sa jolie chapelle.
Le hameau de Supranu
Le second hameau de Fiuminale (Supranu) se perche presque au sommet de la montagne, accroché à la crête rocheuse. Le départ du sentier se fait en haut du premier hameau, il faut passer par le portail (pensez à le refermer) et suivre le balisage orange. Le sentier est raide (certains mettront seulement 15 minutes à monter, d’autres, comme nous, mettront presque une demi heure). Ici on tutoie les plus hauts sommets de la Castagniccia et les montagnes, la forêt et la vue sont grandioses.
Le hameau de Supranu est un peu plus petit que celui de Suttanu, il y a moins de bâtisses, mais reste très intéressant car il est encore en (plus ou moins) bon état. Mais par dessus tout, ce que nous avons apprécié ici, c’est la vue sur les montagnes et jusqu’à la plaine et la côte.
Histoire de Fiuminale
Le Pont de l’Enfer est en fait le point de départ d’un ancien sentier muletier qui s’enfonçait autrefois au cœur des massifs de la Castagniccia, vers des lieux reculés et inaccessibles, où des populations fuyant des guerres et des razzias avaient élu domicile et construit leurs habitations.
Une centaine de personnes vivaient ici jusque dans les années 50; il y avait beaucoup de jardins, de l’élevage et de la polyculture. Ce petit village de Fiuminale est ainsi né de la volonté des hommes de protéger leurs familles et de venir se cacher là où personne ne viendrait les chercher (dans les montagnes). Construit le long d’une arrête rocheuse, le village de Fiuminale se composait jadis de deux ensembles étagés : Fiuminale Suttanu et Fiuminale Supranu (au-dessus). Ces 2 hameaux ont été peuplés jusqu’au milieu du 20ème siècle, avant d’être progressivement abandonnés par les nouvelles générations qui ne voulaient plus subir les rigueurs de l’isolement.
La dernière villageoise, Zia Devota (décédée à 83 ans), a quitté le village en 1981. Elle a vécu ici avec des chèvres, des cochons, des poules et un jardin, et de temps en temps elle descendait à Velone par le Pont de l’Enfer pour aller faire des courses. Antoine Ciosi a chanté une très belle chanson sur le village de Fiuminale après avoir rencontré Zia Devota qui lui a raconté l’histoire de ce territoire : « Fiuminale se meurt malgré sa présence (Zia Devota), Fiuminale se meurt et personne n’en a conscience ». Lorsque Zia Devota est partie, elle a fermé la porte de sa maison, et la porte d’un village et d’un mode de vie. Un peu comme si elle refermait la porte sur une société ancestrale révolue.
Au cœur de Fiuminale Suttanu se trouve la petite chapelle de San Ghjiseppu (St Joseph, le patron de la famille) réhabilitée par l’association San Ghjiseppu di Fiuminale. Sur la porte massive de la chapelle est inscrit « Sempre Fidati » (traduction de toujours fidèle).
L’association locale ne peut pas intervenir sur les propriétés privées du village. Fiuminale n’est plus habité… mais pas totalement abandonné, en effet le vieux village a ses anges gardiens, qui sont tout aussi soucieux de faire revivre le lieu. Certains propriétaires rénovent leur bien (et viennent y passer du temps lorsqu’ils le peuvent), comme la maison ci-dessous à l’entrée de Fiuminale Suttanu dont la toiture, entièrement en lauze, a été refaite en 2019.
L’association San Ghjiseppu di Fiuminale fait revivre le hameau abandonné de Fiuminale Suttanu chaque année le 1er mai. Il y a une messe célébrée en fin de matinée et les gens se retrouvent ensuite autour d’un buffet de produits locaux dans une ambiance conviviale.
Mon père m’a fait connaître ces deux petits villages il y a maintenant, approximativement 45 ans, j’avais alors 14 ans. Lui même connaissait ce village car il y montait souvent lorsqu’il était enfant pour, entre autre, chasser les grives draine qui venaient manger les cerises sur deux cerisiers qui se trouvaient juste au dessus de Fiuminale supranu.
Dans une des maisons de Fiuminale Sopranu y habitait une personne, elle était me semble t il un parent de zia Devota nous avions été invité à boire le café.
Je me rappelle toujours de cette petite dame qui nous racontait qu’elle aimait manger des œufs, je l’écoutais parler, en corse, sa langue maternelle. J’étais en admiration devant ce personnage anachronique. J’étais assis devant ce foccune, où de temps à autre, tombaient du rataghju quelques vers de châtaignes qui étaient entrain de séchées.
Elle nous avait montrer la truies et ses petits, qu’elle avait.
Nous sommes donc retournés la voir quelques jours après, mais cette fois si, pas les mains vident, mais avec 2 poules et un coq. Afin qu’elle puisse avoir ses œufs frais, elle était tellement contente et nous par la même occasion de lui avoir fait plaisir.
Voilà en partie ma petite histoire su Fiuminale e Zia Devota.
Aujourd’hui cest avec mon fils de 7 ans que je suis remonté sur ces lieux d’un autre temps pour qu’il sache, qu’il connaisse l’histoire de ce village, mais surtout de cette vieille dame.
Vous avez une vraie histoire avec ce village, merci pour le partage 🙂
Bonjour,
Le sentier jusque Fiuminale est-il possible pour une personne malvoyante?
Je vous remercie et vous souhaite une magnifique journée.
Christelle
Bonjour Christelle, pas évident de vous répondre, je dirai accompagné de quelqu’un oui, le sentier en lui même est assez facile à suivre mais ça grimpe quasiment tout le long et il y a un petit cours d’eau à traverser à un moment ! Il faut également grimper un peu sur les rochers à la fin, juste avant d’arriver au village, mais si la personne malvoyante est en forme et accompagnée, selon moi, ça peut se faire ! Mais ce n’est qu’un avis personnel, je me trompe peut-être !
Bonjour,
Ça peut être possible en passant par Vellone d’Ornetu, et en prenant le sentier qui mène à Fiuminale supranu et non suttanu qui a un passage délicat, à éviter !
Bien entendu la personne doit être accompagnée et avoir une certaine condition physique, (autant pour l’une que pour l’autre).
Merci pour ces précisions Marchini ! C’est donc le premier sentier dont je parle au début de mon article mais que je n’ai pas testé !
Mes ancêtres BERNARDINI ont vécu au hameau de Fiuminale puis à Velone Carbonaccia Je me rends en Corse en septembre et j’ai évidemment prévu de m’y rendre en empruntant le sentier .
Vous allez adorer, c’est un trajet très agréable et le village revit petit à petit, nous avons même pu discuter avec une famille qui possède une maison là-haut et qui était en train de la restaurer. Nous l’avions fait le premier jour du confinement, ce fut notre dernière balade avant un bon moment du coup, je m’en rappelle très bien.
J’ai entendu parler de ce village par Fiuminale chants corses de passage à Champagnole dans le Jura(39300) concert super et explications intéressantes de la part de ces deux artistes pour revenir à ce village celà doit être vraiment superbe pour moi qui suis amateur de rando !!
Ah oui je confirme c’est une très belle randonnée !